Comme tous les grandes artistes, Ingrid Perruche possède ce don unique de faire passer l’auditoire du rire aux larmes en un clin d’œil. D’une force dramatique imparable dans les ouvrages « nobles » (notamment dans la tragédie lyrique) où l’intensité de la projection et la diction acérée comme une lame font merveille, elle est tout autant capable de manier un humour irrésistible, hilarante dans les rôles de composition.
Sans doute ces qualités proviennent-elles de sa formation en lettres modernes, au terme de laquelle elle se consacre au chant et intègre la classe de Glenn Chambers au Con-servatoire National Supérieur de Musique de Lyon.

Sous l’impulsion notamment de Jean-Claude Malgoire, grand découvreur de talents, elle se produit très vite sur la plupart des grandes scènes françaises, telles que le Théâtre des Champs-Élysées, la Cité de la musique ou le Théâtre du Châtelet à Paris, les Opéras de Marseille, Rennes, Rouen, Saint-Étienne, Lille, Bordeaux, Nancy, Montpellier, Tours, Caen, Dijon ou Versailles. À l’étranger, elle brille au Theater an der Wien, au Grand-Théâtre de Genève, à l’Opéra de Lausanne, etc.

Son répertoire couvre toutes les époques et toutes les esthétiques : Monteverdi (La Fortuna dans L’Incoronazione di Poppea), Händel (Poppea dans Agrippina, Almirena dans Rinaldo et Cleopatra dans Giulio Cesare), Gluck (Euridice dans Orfeo ed Euridice), Mozart (Servilia dans La Clemenza di Tito, Pamina dans Die Zauberflöte), etc.
Grande prêtresse de la déclamation, elle éprouve bien sûr une affinité particulière pour la musique française : Lully (Mélisse dans Atys, Stenobée dans Bellerophon, Clymène dans Phaeton, Arcabonne dans Amadis), Desmarets (Bellone dans Vénus et Adonis), Rameau (Iphise dans Dardanus), Destouches (La Reine dans Callirohé), Messager (rôle-titre ou Agathe dans Véronique), Poulenc (La Voix Humaine), Christiné (Denise dans Dédé). Elle est une merveilleuse Mélisande, rôle qu’elle chante dans la version piano (avec Alexandre Tharaud et Philippe Cassard) ou celle avec orchestre (direction de Juraj Valcuha et mise en scène d’Alain Garichot).

Pour tous ces projets, elle collabore avec des chefs dont l’aréopage en impose : Jean-Yves Ossonce, William Christie, Christophe Rousset, Emmanuelle Haïm, Hervé Niquet, Rinaldo Alessandrini, Jean-Christophe Spinosi, Giuseppe Grazioli ou François-Xavier Roth, Emmanuel Krivine, Laurent Petitgirard, Pierre Cao, Yan-Pascal Tortelier, Alain Altinoglu ou le regretté Kurt Masur, avec l’Orchestre National de France, le Philharmonique de Radio France, le Sinfonia Varsovia... Les metteurs en scène sont tout aussi célèbres : Fanny Ardant, Alain Garichot, Yannis Kokkos, Pierre Constant, Robert Carsen, Pierre-André Weitz, etc.

Les saisons récentes ont été marquées par des accomplissements notoires : Ingrid Perruche a littéralement brûlé les planches dans le rôle de la Duchesse Totoche dans Les Chevaliers de la Table ronde d’Hervé avec Les Brigands (Opéras de Bordeaux, Rennes, Angers Nantes, La Fenice de Venise), Despina dans Così fan tutte (Opéra de Marseille), Marcellina dans Le Nozze di Figaro (Théâtre du Capitole de Toulouse), Dame Marthe dans la version originale du Faust de Gounod, sous la direction de Christophe Rousset et avec Les Talens Lyriques au Théâtre des Champs-Élysées, sous l'égide du Palazetto Bru Zane qui en a assuré l’enregistrement paru à l’automne 2019). Fleur-de-Noblesse dans V’lan dans l’œil d’Hervé (Opéra de Bordeaux, Théâtre du Châtelet), sans oublier les rôles d’Amarante, Babette et Javotte dans Madame Angot de Lecocq (Théâtre des Champs-Élysées). Dans La Vie Parisienne d’Offenbach, elle a incarné aussi bien la Baronne de Gondremarck (Opéra Grand Avignon) que Mme Kimper Karadec (mise en scène de Christian Lacroix, Opéras de Rouen et de Tours, Théâtre des Champs-Élysées).

La saison 2023/2024 confirme son amour de la musique française, sérieuse (Mistress Bentson dans Lakmé de Delibes à l’Opéra du Rhin sous la direction de Guillaume Tourniaire et dans une mise en scène de Laurent Pelly) ou légère (reprise de La Vie Parisienne vue par Christian Lacroix dirigée cette fois par Romain Dumas à l’Opéra de Montpellier).